Le 20e siècle a vu entre autres l’avènement de ce phénomène très étrange que constituent les groupes de motards. Dans le contexte de remise en question de toutes les certitudes qui a accompagné la seconde partie du siècle, sans doute le besoin de quitter ce marasme ambiant et de se retrouver autour de valeurs communes simples tels que la passion pour une activité ou le simple fait d’être ensemble prévalut. Si bien que des groupes de motards animés par leur amour des grosses cylindrées vit le jour, tout d’abord sur le sol américain puis sur l’ensemble de la planète, en Écosse, en Russie, en Allemagne, au Canada et même en Afrique du Sud. Le Crusaders
MC est ainsi un groupe de motards né sur le continent africain. Ils sont assez peu nombreux pour être remarqués, celui-ci étant particulièrement remarquable.
Sommaire
Origines du Crusaders MC
Comme la plupart des grandes histoires, celle-ci naquit de manière simple et banale. C’est en effet en partant d’une discussion entre potes que l’idée d’un club surgit, de manière quasi accidentelle. C’est dans une boutique de tatouage que quelques amis, Rocky Wainstein, Carlos da Rocha, Arnold “Axl” Aarons et Carlos “Cowboy” Duarte, commencèrent à discuter de la fondation d’un club de moto. L’idée, toutefois, ne vit le jour que quelques mois plus tard après de nombreuses discussions sur le nom et l’esprit du groupe. Plusieurs variations furent suggérées, toutefois c’est le nom de Crusaders qui l’emporta. Ainsi, fut fondé en septembre 2006 ; le Crusaders South Africa MC.
Il était en effet nécessaire de préciser l’origine géographique du club dans la mesure où ce nom était déjà plébiscité par de nombreux groupes de motards, au Dakota et en Slovaquie notamment. Il n’a jamais été question pour eux de marcher sur les plate-bande des autres. Nous pouvons constater qu’aucune réunion, à ce jour et à notre connaissance, n’a eu lieu entre les différents clubs portant le même nom.
Cela a pourtant été le cas avec les Blue Angels écossais qui se sont réunis avec leurs homologues belges, jusqu’à fonder un club commun. Rien de tout cela chez les Crusaders de l’Afrique du Sud, qui reste, et c’est un souhait de leur part, un mouvement national. Le club prit très vite de l’ampleur et fonda de nombreux chapitres. À l’heure actuelle, il comporte environ 1000 membres et plus de 25 chapitres répartis en Afrique du Sud.
Les spécificités du Club
La spécificité de ce club est d’abord une spécificité géographique. En effet, il existe très peu de clubs de motards sur le continent africain. Une carte virtuelle permettrait aisément de rendre compte de la répartition inégale des bikers regroupés en associations. Cette inégalité peut s’expliquer par différents moyens : les habitants du continent africain sont sans doute, de par les températures extrêmes et la composition géologique de leur sol, moins enclins à accueillir des motos ; il est probable que la grande pauvreté rende la possession d’une moto moins prioritaire aux yeux des habitants du continent africain, ou peut-être est-ce une forme d’hostilité nourrie à l’égard des Américains… il y a sans doute un peu de cela, il reste que les motards africains sont assez rares. La grande majorité d’entre eux se situe en Amérique, terre d’origine du phénomène des gangs de motards.
À ce titre, les Crusaders sont déjà une exception. Une autre spécificité du club repose également sur la nécessité de piloter une grosse cylindrée américaine, cela est assez courant et constitue peut-être le point commun de tous les MC. C’est d’autant plus remarquable que nous supposons que l’approvisionnement des pièces de ces motos très spécifiques ne doit pas être évident. Cela doit entraîner de belles parties de bricolage ou une sacrée dose de patience. Contrairement à la plupart de leurs homologues, les Crusaders ne cultivent aucune animosité à l’écart du reste de la population, nous le verrons. Toutefois leurs règles sont assez strictes. Leur but, peut-être est-ce dû à la grande pauvreté de leur pays d’origine, est de venir en aide à leur concitoyens et non de se distinguer par des exactions ou des faits d’armes, déjà assez présents dans ce pays.
Les Couleurs et le Code d’Honneur des Crusaders MC
Faire partie d’un club de moto, à des degrés divers, suppose l’adoption de tout une vie dédiée au club, depuis les soirées et les temps libres, jusqu’au style vestimentaire. Bien que les Crusaders ne semblent pas être un club très virulent, cela entraîne de la part des membres une certaine abnégation. Le port de vêtements faits pour la moto et dédiés au club en fait partie. Le logo des Crusaders, que l’on trouve au dos de leur blouson de cuir, montre bien cette forme d’abnégation. Ce logo représente, en rouge et jaune, la croix des croisades. Au premier plan nous distinguons un casque avec deux haches croisées derrière, les lames des haches sont serties de croix. Les références à l’univers chrétien sont ainsi évidentes, en particulier la dimension historique des croisades, qui constituait des voyages entrepris par des chevaliers pour reconquérir Jérusalem.
Il ne s’agit certainement pas de cela dans la démarche des Crusaders d’Afrique du Sud, mais ce logo est particulièrement intéressant. Il s’agit d’une forme de croisade pour les membres dans la mesure où ils veulent, et c’est un point d’honneur pour eux, aider leur prochain. Malheureusement, cette quête n’est jamais terminée et peut effectivement être assimilée à une forme de croisade. aucun crâne sur ce logo, aucune forme d’agressivité si ce n’est les haches toutefois modérées par la présence des croix. Le logo des Crusaders semble assez pacifique. Au-dessus du logo nous trouvons l’inscription “Crusaders” et au-dessous la mention du pays d’origine : South Africa. Africa.
Le logo mentionne également le fameux 1%. Cela fait référence à l’univers des gangs de motards, qui ont été surnommés ainsi par la police car ils ne représentent que 1 % des motards causant des troubles par opposition aux 99 autres pour cent qui se conduisent correctement. Ainsi, appartenir au fameux groupe des 1 % est à la fois un signe de gloire et une sorte de menace pour les autres.
Or, en regardant d’un peu plus près les actions entreprises par le Crusaders on s’aperçoit que nous sommes à mille lieues des méfaits commis par les autres gangs, qui se distinguent régulièrement par du grand banditisme, du trafic de drogue, de l’attaque à main armée ou du proxénétisme. Rien de tout cela en Afrique du Sud. On peut se demander alors la légitimité de cette mention qui semble leur tenir à cœur.
De même, la devise des crusaders est intéressante : « See everything, hear everything, say nothing. » Tout voir, tout entendre, ne rien dire. Cette devise pourrait être celle d’un gang de criminel, ce qui est loin d’être le cas chez les Crusaders. Nous pouvons l’interpréter d’une autre manière. De par leurs nombreuses actions, ils sont exposés à la grande détresse et l’immense pauvreté des habitants du pays. Peut-être ce désir de ne pas en témoigner révèle-t-elle une forme de pudeur, comme si l’action généreuse n’avait pas besoin d’être clamée au grand jour.
Ces actions généreuses sont pourtant l’apanage des Crusaders, qui font de nombreuses quêtes et actions caritatives pour venir en aide aux plus démunis. Le sens de l’honneur est extrêmement important chez eux, cela se perçoit aisément en parcourant leur site Internet, ou l’hommage aux anciens membres décédés et très présent, ainsi que les événements auxquels ils prennent par : collect, manifestation, aide à la personne…les Crusaders se posent comme étant des croisés des temps modernes, au service des autres.
Conclusion
Se pencher sur le phénomène des clubs de motards reste une expérience étonnante. Loin des poncifs et des clichés sur les mauvais garçons roulant à tombeau ouvert sur leur grosse cylindrée. L’exemple des Crusaders est intéressant car nous avons un club entièrement tourné vers des valeurs humaines : l’entraide, la solidarité, le respect, loin de la quête de prestige ou d’argent facile, qui caractérise souvent leurs homologues. Ainsi, même quand on porte un blouson noir, quand on aime l’odeur de l’huile et le bruit des moteurs, on peut faire preuve d’humanité et d’ouverture.